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Frère Philippe

Le coeur entre France et Irak

Originaire de Bagdad, le frère Philippe Koshaba connaît la guerre au quotidien en Irak. De passage dans la région, il soutient les réfugiés arrivés il y a quelques mois à Lille grâce à l’aide du frère Sarmad du Couvent des Dominicains de Saint-Maure. Portait d’un homme qui consacre sa vie au bonheur des autres. 

La hantise de Daech

 

Ce dimanche, ils donnent ensemble une messe en araméen. Frère Philippe et frère Sarmad s’échangent des regards complices. De l’autre côté de l’autel, les familles de réfugiés se retrouvent pour vivre un moment exclusif. Un temps de prière partagé avec quelques familles françaises venues marquer leur solidarité. Regard chaleureux, cet homme de 49 ans dégage une sensibilité hors pairs. Décontracté dans le réfectoire du couvent à l’occasion d’un goûter, il embrasse un par un toutes les personnes présentes. Vêtu d’une tunique blanche, il enveloppe dans ses bras un petit Irakien. La longue manche blanche de sa chasuble recouvre entièrement la tête du jeune homme à la recherche d’un petit morceau de gâteau. « Cette messe a lieu tous les deuxièmes dimanches du mois. Elle leur permet de se retrouver et de pratiquer la langue française », explique-t-il. Accessible et souriant, le frère Philippe, souhaite, le temps de quelques heures, transporter ces jeunes couples, ces enfants, ces adolescents, loin de la guerre, loin de « ce Daech » qui les hante et occupe toujours leurs pensées. « Après les attentats du 13 novembre, j’ai vu l’indignation, la peur et l’inquiétude des Irakiens chrétiens d’Orient à Lille. Ils ne veulent pas revivre la guerre en France ».

 

 

Simple et honnête

 

« Certains d’entre eux avaient une position confortable en Irak avec une reconnaissance de la société. La transition a été difficile mais il fallait assurer un avenir pour leurs enfants, loin des bombes et des enlèvements », témoigne le frère Philippe, assigné au couvent des frères dominicains à Mossoul en 2001, subissant de plein fouet la violence de la guerre d’Irak. « J’ai perdu un de mes frères dans un attentat contre l’ONU ». Aujourd’hui, ce religieux au contact extrêmement simple et honnête exerce à Bagdad tout en gardant un lien étroit avec la France. Il a pu obtenir une bourse d’Etat pour un doctorat en théologie catholique à Strasbourg qu’il achèvera en juin 2016. « Cela me permet de continuer à aider à ma petite échelle les réfugiés de mon pays, à Strasbourg ou ailleurs en Europe. Je me déplace en Suède et en Allemagne mais je compte bien revenir à Lille dès mon retour en France en février ».  

 

 

La dernière heure

 

En attendant, il consacre son temps et sa force à la publication de La pensée chrétienne, une revue qui paraît cinq fois par an, traitant d’actualité, de christianisme et de culture. Elle est aussi adaptée pour enfants. Seul membre de sa famille à ne pas avoir fui l’Irak, il s’accroche à sa terre pour venir en aide aux plus démunis. « Tant que j’ai le souffle en moi, je vais continuer à transmettre ma foi. On ne peut pas sauver l’Irak  mais j’espère ne pas m’enlever l’espoir de rester ici. Je ne pourrai jamais quitter mon pays. Il a besoin de ma contribution ». Il soupire. « La peur qui me paralyse m’aide à produire le meilleur de moi-même, comme s’il n’y avait plus de temps à perdre. Comme si c’était la dernière heure ».

 

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